Erwin Deseyn, Chief Investment Officer chez CapitalatWork, partage son analyse sur l’évolution des marchés financiers et les réponses stratégiques adoptées par notre équipe.
Augmentation des taux longs
La première chose à noter est une augmentation notable des taux longs.
Les taux courts, influencés par la politique monétaire des banquiers centraux, ont augmenté de 4 à 5% au cours des 18 derniers mois. Mais cette hausse ne se reflétait pas encore au niveau du marché obligataire, qui n’avait augmenté que de 3% en moyenne.
Cette dynamique a entraîné une inversion de la courbe des taux, avec des taux courts qui ont dépassé les taux longs.
Cependant, l’augmentation récente des taux longs a pratiquement renversé cette tendance.
Deux facteurs principaux semblent expliquer cette évolution.
Premièrement, les banquiers centraux ont annoncé le maintien de leur politique de taux élevés pour une période plus longue que prévu. Cette décision est motivée par le fait que l’inflation persiste et que l’économie se montre également plus résiliente face à cette hausse de taux. Ces deux facteurs sont le fruit du déséquilibre budgétaire des états dont les dépenses excèdent les recettes.
D’autre part l’offre et la demande sur les marchés obligataires ont considérablement évolué. D’une part parce que les déficits budgétaires étatiques ont fait croître l’offre de dettes gouvernementales. D’autre part en raison de la diminution de la demande pour les obligations d’État.
En effet, les principaux acheteurs d’obligations d’État américaines (les banquiers centraux, les banques régionales américaines et la Chine) ont réduit leur demande pour ces obligations :
- les banquiers centraux ont changé leur politique et réduisent les obligations d’État dans leur bilan
- les banques régionales américaines quant à elles n’avaient plus intérêt à acheter des obligations long terme américaines étant donné que les taux courts étaient plus élevés que les taux longs
- et enfin, la Chine, dont le surplus commercial était converti en obligations d’État américaine a également revu sa position
Comment CapitalatWork s’adapte à ce nouveau contexte ?
Il semble que le cycle de hausse des taux des banques centrales touche à sa fin. Car même si les banques centrales veulent maintenir les taux élevés pour une plus longue période, cela ne signifie par forcément qu’elles vont continuer à les augmenter. Première incertitude. Ensuite, un nouvel équilibre entre l’offre et la demande sur le marché des taux longs doit encore être trouvé, et il est difficile de savoir quel sera l’impact sur l’inflation. Deuxième incertitude.
Dans ce contexte incertain, nous avons ajusté notre stratégie d’investissement.
Chez CapitalatWork nous investissons principalement dans 3 classes d’actifs :
- les obligations d’État
- les obligations de sociétés
- les actions
Pour les obligations d’État, nous avons adopté une approche « contrarian ». Nous avons augmenté la duration* du portefeuille, fixant ainsi des taux élevés pour une période prolongée. De plus, nous avons mis en place un plan de progression graduelle de la duration au cas où la hausse des taux continuerait.
Concernant les obligations d’entreprises, la période inflatoire a généré une diminution relative de l’endettement des entreprises. Et il s’avère que la plupart des sociétés dans lesquelles nous investissons ont bien géré cet endettement, en allongeant la duration pour sécuriser les taux bas.
Enfin, les perspectives pour les marchés boursiers semblent favorables, avec la perspective d’une contribution positive de l’inflation aux revenus des entreprises et une éventuelle stabilisation, voire une baisse des taux dans un avenir proche.
Cette revue des marchés financiers souligne l’importance de s’adapter à un environnement en constante évolution tout en tirant parti des opportunités émergentes.
* la duration correspond à la durée de vie moyenne pondérée d’un portefeuille obligataire. Elle permet de mesurer la sensibilité du prix d’une obligation aux variations des taux d’intérêts. Normalement, plus la duration d’une obligation est longue, plus le prix de l’obligation sera sensible aux variations de ces taux.